Le Manifeste du RAP de 1998 marque un coup d’envoi important dans le processus de rassemblement et d’unification de la gauche québécoise. Au moment où celle-ci est traversée par des débats fondamentaux, il me semble utile de relire le manifeste qui a permis la naissance d’un mouvement, puis d’un parti, qui a connu une suite de regroupements et de fusions, dont l’Union des forces progressistes et Option citoyenne, et plus récemment, Option nationale, qui ont conduit au parti Québec solidaire que nous connaissons aujourd’hui. Si un certain ménage et une mise à jour s’imposent, il nous faut savoir éviter de « jeter le bébé avec l’eau du bain ». Ayons la sagesse de nous alléger de ce qui est trop lourd à porter et de conserver ce qui est essentiel pour la réalisation du projet de société, porté par nos rêves et engendré par nos efforts depuis plus de 25 ans maintenant. Ce manifeste en fait partie.

Assemblée électorale à l’occasion de la campagne du candidat du RAP Michel Chartrand dans Jonquière en 1998.
Manifeste du Rassemblement pour l’alternative politique

« Pour que renaisse l’espoir »
UN VENT DE DROITE BALAIE LE QUÉBEC
1. Un vent de droite, le vent porté par le néolibéralisme, balaie le Québec depuis le début des années 80. Il s’agit là d’une forme critique du capitalisme, dans toute sa nudité, toute sa cruauté, toute sa sauvagerie. C’est une crise multiforme, à la fois économique, politique, idéologique et stratégique, essentiellement marquée par la volonté de destruction progressive de l’état et d’imposition de la dictature du marché.
2. Le référendum du 30 octobre 1995 constitue un point tournant dans l’accélération de ce processus d’installation du néolibéralisme au Québec. Au cours des mois qui ont précédé ce référendum, une mobilisation d’une ampleur jamais vue des forces progressistes québécoises, regroupant l’immense majorité des organisations syndicales et populaires, s’était réalisée pour apporter un soutien sans précédent au camp du OUI. Partout à travers le Québec, des milliers de Québécoises et Québécois de toutes origines ont pris la parole et investi leurs espoirs dans un changement de statut politique qu’elles et qu’ils associaient à un changement social en profondeur. Cet espoir s’est traduit par un vote très majoritaire en faveur du OUI dans les quartiers et régions les plus défavorisés du Québec. Malgré cela, le Québec a raté son rendez-vous avec l’Histoire.
3. Dès le lendemain de cette défaite, le gouvernement du Parti québécois, sans mandat populaire mais avec l’acceptation des directions syndicales et du patronat et malgré les résistances citoyennes, populaires et communautaires, s’alliait, lors du tristement célèbre Sommet socio-économique du Déficit Zéro, aux forces mêmes qui avaient juré de nous « écraser » lors de la campagne référendaire.
4. De fait, le projet de souveraineté était mis au rancart. Il s’agissait, désormais, de s’adapter aux forces du marché et de mettre le Québec à l’heure de la mondialisation, selon les dires mêmes du Premier ministre, en supprimant toutes les barrières à la compétition mondiale et au rendement des entreprises.
5. C’est ainsi que, dans son souffle, le vent néolibéral allait emporter, entre autres morceaux de notre édifice social, 300 hôpitaux et centres d’accueil, 30 000 emplois dans la fonction publique, 1,2 milliard dans le budget de l’éducation, 75% du personnel d’enquête et 40% du budget du ministre de l’Environnement, considéré comme un obstacle au développement économique. La bourrasque allait également déposer une facture de 500 millions sur le perron des hôtels de ville déjà durement éprouvés ces dernières années. Tout le monde doit contribuer à l’élimination du déficit, mais on ne demande rien aux entreprises. On pourchasse le travail au noir qui est souvent moins de la fraude que de la survie, mais on ferme les yeux sur l’évasion fiscale des riches et on annonce une réduction du tiers de la taxe des entreprises sur la masse salariale. On n’hésite pas à démanteler les outils de développement et les protections sociales, environnementales et culturelles dont on était fier, au profit des grandes entreprises.
6. Des milliers de personnes exclues de l’emploi suite à la réorganisation, à la fusion, à la relocalisation ou tout simplement à la fermeture d’entreprises ou de services publics ne peuvent plus compter sur un véritable soutien de l’État. Elles sont condamnées à errer dans les dédales des programmes d’assurance-chômage, si elles font partie des 50% qui ont encore droit à des prestations réduites, avant de se retrouver dans les sinistres « parcours de l’emploi » de l’aide sociale qui peuvent, pénalités aidant, mener au dénuement total, avec son cortège d’endettement et de vente de maison, sans parler des divorces, des suicides et de la désintégration des milieux de vie qui s’en suivent. Celles et ceux qui ont encore un emploi doivent souvent consentir des baisses de salaires et travailler plus longtemps. Les familles monoparentales, les étudiantes et étudiants ainsi que les jeunes écopent plus que les autres. Les personnes exclues, au sein desquelles les femmes sont les plus pauvres d’entre les pauvres, forment plus du quart de la population et l’appauvrissement gagne les classes moyennes: 52% des Québécoises et Québécois vivent avec un revenu annuel de moins de 20 000 $.
LE DÉFICIT COMME ARME D’INTIMIDATION
7. Pour justifier ces compressions, une campagne orchestrée et financée par les tenantes et tenants du néolibéralisme et soutenue par la classe politique et les responsables des médias qu’elles et qu’ils manipulent en coulisses, a cherché à imposer l’idée que le Déficit était un ogre qui allait bouffer l’ensemble du corps de l’État si l’on ne calmait pas dès maintenant ses appétits en lui sacrifiant tantôt une jambe, tantôt un bras de ces services sociaux dont les coûts croissants auraient engendré le monstre. En brandissant la menace des agences de cote de crédit, on a fini par faire croire à tout le monde qu’on n’avait plus les moyens de se payer ces services.
8. La vérité est aujourd’hui connue et elle est tout autre. Les programmes sociaux ne sont pas à l’origine de la dette accumulée et des déficits récurrents. Ceux-ci découlent de deux causes principales: d’une part, la politique des taux d’intérêts élevés de la Banque du Canada dictée par les banques et les détentrices et détenteurs d’actions pour casser l’inflation qui rongeait leurs fortunes et, d’autre part, la multiplication des abris fiscaux et les diminutions d’impôts consenties aux entreprises qui ont privé l’État de revenus essentiels et ce, sans créer les emplois promis. Le libre-échange n’a fait qu’aggraver la situation des travailleuses et travailleurs et des personnes exclues en incitant les entreprises à s’aligner sur les pays les moins avancés. Et la tromperie de cette campagne apparaît au grand jour quand on nous annonce qu’on réinvestira les surplus à venir dans des réductions d’impôts, qui ne profiteront qu’aux riches et aux entreprises, plutôt que dans les programmes sociaux et les services publics.
9. Un profond changement idéologique a accompagné les politiques du Déficit Zéro. On a remis en question le rôle de l’État en tant que redistributeur de la richesse et des revenus, de garant de l’intérêt collectif, d’émanation de la volonté populaire. L’État abdique sa souveraineté au profit du pouvoir économique. Le marché remplace l’État. La citoyenne ou le citoyen n’est plus qu’une cliente ou un client et une consommatrice ou un consommateur. L’intérêt privé a priorité sur l’intérêt public. Le collectif cède la place à l’égoïsme individuel. Les citoyennes et citoyens sont trahis par leurs élues et élus qui gouvernent pour les entreprises plutôt que pour le monde. La justice sociale est remplacée par la philanthropie et la charité privée qui entretiennent la pauvreté et culpabilisent les pauvres. La démocratie ne fonctionne plus.
10. Désormais, la redistribution de la richesse et des revenus ne se fait plus par l’État via une fiscalité équitable et des services publics humains mais par le biais de la Bourse, même si 74% de la population n’y possèdent aucune action. C’est cette main invisible providentielle qui a déposé en 1997 28 millions de dollars en rémunérations dans les poches de Robert Gratton de Power Corporation; mais c’est néanmoins une décision gouvernementale qui fait en sorte que, de ce montant, 23 millions provenant de l’exercice d’options d’achat ne sont taxés qu’à 75%, alors que le salaire d’une travailleuse ou d’un travailleur est imposé à 100%, et que les 63 millions en options d’achat d’actions que Laurent Beaudoin laisse dormir sans les exercer ne seront pas taxés parce que le Canada est un des seuls pays développés à ne pas avoir d’impôt sur la fortune.
11. La dictature du marché requiert la privatisation de joyaux collectifs comme la SAQ et Hydro-Québec et, bientôt, de ce bien essentiel à la vie qu’est l’eau; elle requiert également la mise sur pied de laboratoires, de cliniques et d’hôpitaux privés pour éviter les listes d’attente et l’insuffisance des services publics de santé; elle requiert enfin l’introduction dans les écoles de commanditaires et de fondations privées ainsi que l’augmentation des frais de scolarité et une taxe à l’échec pour compenser le sous-financement des écoles, sans tenir compte du fait qu’on aggrave ainsi l’endettement, le décrochage, l’analphabétisme, le chômage et la mendicité chez les jeunes.
12. La dictature du marché refoule la culture nationale dans les marges de l’histoire et impose l’hégémonie culturelle des nations et des groupes qui dominent sur les marchés économiques mondiaux. L’argent est l’unique valeur.
13. La dictature du marché pousse à une croissance sans fin et à une consommation illimitée pour satisfaire des besoins souvent artificiels, mettant ainsi en danger l’avenir des ressources et l’équilibre vital de la planète.
14. La dictature du marché amène avec elle le libre-échange et la mondialisation de l’économie qui ne sont, dans les faits, qu’une américanisation de notre économie et qui nous réduisent à être un peuple de sous-traitants de l’Oncle Sam et, de nouveau, « les nègres blancs d’Amérique ». La mondialisation concentre la richesse entre les mains d’une minorité regroupée dans des organismes internationaux privés comme l’OCDE, le FMI et la Banque mondiale, qui font plier les gouvernements. Les négociations en cours de l’Accord multilatéral sur les investissements (AMI), qualifié par le directeur même de l’OCDE de nouvelle constitution de l’économie mondiale unifiée, sont un exemple révoltant de la volonté de ce pouvoir économique mondial parallèle de se soustraire au contrôle des États nationaux et à sa contribution sociale. Les 358 personnes, dont la fortune est supérieure au revenu annuel des 45 % d’humains les plus pauvres, soit 2,6 milliards de personnes, mènent le monde à un désastre économique, à un désastre écologique et à un nouvel esclavage à dimension planétaire.
15. Aujourd’hui, à l’aube de l’an 2000, le Québec se rebelle et veut reprendre en mains son destin. Cinquante ans après celui de nos aînées et aînés, le Québec oppose un autre refus global à la trahison de nos élites qui prétendent que nous n’avons pas le choix, qu’il n’y a pas de salut hors de l’entreprise privée et que la loi du profit et du libre marché est une loi naturelle. Il n’est pas vrai qu’on n’a pas le choix, qu’on est obligé de mourir dans un corridor d’hôpital, de croire au Déficit Zéro ou de voter pour des partis qui pensent encore que les entreprises créent des emplois et qu’il faut les subventionner abondamment.
16. Il faut reprendre la parole et s’engager dans l’action pour remplacer le Déficit Zéro des gouvernements par le déficit démocratique zéro, par la pauvreté zéro et par le développement viable. Il faut désarmer ce pouvoir économique mondial et le mettre hors d’état de nuire.
17. Nous voulons maîtriser notre destin en utilisant les ressources naturelles dans une perspective de conservation et de renouvellement continu et ce, pour la satisfaction des besoins matériels, culturels, intellectuels et sociaux de l’immense majorité des gens de ce coin de terre et non pour la recherche du profit maximum. Nous voulons que la coopération, la fraternité, la solidarité et l’espoir remplacent la compétition, l’angoisse, l’anxiété et la peur du lendemain. Nous voulons, toutes et tous, profiter des bienfaits de siècles de progrès technologique et des gains de productivité qui accompagnent ce progrès. C’est ainsi que nous comprenons la mondialisation.
18. Nous considérons que l’État doit placer le bien commun au-dessus des lois du marché et garantir la redistribution des richesses collectives et des revenus par une fiscalité équitable, des services collectifs complets, une politique de plein emploi et un niveau de vie décent. La solution de rechange à l’État-providence n’est pas l’État minimal mais l’État démocratique, respectueux des citoyennes et citoyens et gérant du bien commun, l’État rassembleur et non l’État qui creuse un fossé entre les riches et les pauvres.
19. Nous voulons pour toutes et tous un travail qui leur permette de vivre décemment et d’apporter une contribution valorisante à la société. Comme l’économie moderne, même en croissance, ne semble plus en mesure d’assurer un emploi et un salaire conventionnel à tout le monde et laisse de côté un nombre croissant de personnes exclues, nous réclamons une réduction générale et importante du temps de travail avec pleine compensation de façon à répartir équitablement, d’une part, le temps obligatoire de travail nécessaire à produire les biens et services nécessaires et, d’autre part, le temps libre pouvant être consacré à l’épanouissement physique, culturel et social des individus.
20. Nous croyons qu’on peut créer de nombreux nouveaux emplois bien rémunérés dans des secteurs considérés à tort comme non productifs, tels que l’aménagement des ressources naturelles et patrimoniales, l’environnement, le développement culturel, l’éducation, la prise en charge des enfants et de groupes de personnes dans le besoin et ce, sans remettre en cause la nécessité des services offerts par le secteur public.
21. Nous voulons assurer à toutes et à tous l’accessibilité à l’éducation gratuite et à la formation qui leur permettraient de s’intégrer dans une société qui repose de plus en plus sur le savoir.
22. Nous réaffirmons l’importance de garantir des services publics gratuits, universels, complets et de qualité dans les domaines de la santé et des services sociaux, de l’éducation, de la justice, de la famille, de la culture, des loisirs et de la protection de la citoyenne et du citoyen.
23. Nous voulons un revenu décent garanti et des mesures d’intégration sociale sans harcèlement de l’État; de toute évidence, la multitude incohérente des programmes sociaux actuels ne suffit plus à contrer la pauvreté et l’exclusion sociale et nous croyons qu’il faut mettre au point un système qui intègre l’ensemble des mesures visant à garantir à chacune et à chacun un revenu décent et une contribution sociale valorisante.
24. Nous voulons une réforme de la fiscalité nationale et internationale car, sans les centaines de milliards de dollars qui échappent à l’impôt par les abris et paradis fiscaux, les taux d’imposition outrageusement bas ou l’absence totale d’imposition sur les fortunes, les successions familiales, les sorties de capitaux et les spéculations financières, il est impossible de s’attaquer sérieusement au problème de l’exclusion et de l’écart entre les riches et les pauvres.
25. Nous entendons développer un projet démocratique fondé sur les principes de la souveraineté populaire et de la participation réelle des citoyennes et citoyens en favorisant l’information et l’éducation politique afin d’assurer que les décisions soient prises dans l’intérêt de la majorité et non des groupes d’intérêts puissants qui soudoient les politiciennes et politiciens, la haute fonction publique ainsi que certaines dirigeantes et certains dirigeants syndicaux et intimident les gouvernements coupés de la base. Nous voulons redonner la parole aux citoyennes et citoyens, recréer des lieux politiques de discussion et de décision de façon à leur redonner un rôle actif. Nous favorisons l’institution d’une assemblée représentative des différents secteurs de la société, d’une assemblée constituante en vue de l’élaboration d’une constitution pour le Québec. Nous voulons encourager l’action collective des individus en favorisant l’accès à la syndicalisation et le soutien aux associations populaires, aux coopératives et aux organismes communautaires.
26. Nous voulons permettre à toutes et à tous de participer à notre vie démocratique pour édifier ensemble un État démocratique et laïc qui se fonde sur le respect des personnes et de l’environnement et sur l’égalité entre les citoyennes et les citoyens, quels que soient leur sexe, leur origine sociale ou nationale, leur religion, leur orientation sexuelle ou la couleur de leur peau. Nous voulons garantir à toutes et à tous les mêmes droits et prévenir le racisme et la discrimination par des mesures adéquates.
27. Nous combattons pour l’égalité entre les femmes et les hommes dans tous les domaines. Nous aspirons à de nouveaux rapports humains faits de complicité, d’amour, de responsabilité partagée aussi bien au travail que dans la vie privée, notamment dans l’éducation des enfants qui est aussi une responsabilité sociale.
28. Nous considérons qu’il est de notre devoir de reconnaître le droit à l’autodétermination aux Premières nations de ce pays et d’établir avec elles des rapports de collaboration de nation à nation et ce, dans le respect mutuel.
29. Nous voulons améliorer notre système de représentation politique en instaurant le plus tôt possible un mode de scrutin proportionnel, en donnant plus de pouvoir aux députées et députés et moins à l’exécutif et aux partis, en dotant les régions de structures électives responsables et imputables, en prévoyant un mécanisme de rappel des élues et élus et en assurant une représentation politique proportionnelle à la réalité sociale.
30. Nous concevons le développement régional en complémentarité avec le développement national et nous prévoyons un partage des pouvoirs et responsabilités entre l’État national et les régions.
31. Nous prévoyons que l’État national conserve la responsabilité des droits des personnes et des collectivités, de la justice et de l’équité sociales, de la protection du patrimoine collectif et des ressources naturelles, et nous incitons l’État central à investir afin d’accélérer le développement économique des régions.
32. Nous recherchons la réappropriation collective de la richesse par la remise aux régions d’une partie des redevances de la gestion des ressources naturelles, l’intensification de la transformation locale, la constitution de patrimoines collectifs et la diversification des activités dans les régions.
33. Nous proposons de contrer l’écart économique entre les régions en appliquant des politiques nationales de redistribution sociale et de financement par un système de péréquation équitable préservant notamment l’accès universel aux services publics.
34. Nous préconisons l’établissement de structures régionales électives aptes à démocratiser les orientations du développement régional.
FAIRE LA SOUVERAINETÉ POPULAIRE
35. Parce que, comme le disait l’écrivain Jacques Ferron, nous sommes d’abord de la petite rue où nous sommes nés, du quartier ou du village où nous avons grandi, de la ville où nous travaillons, et parce que les Québécoises et Québécois forment un peuple, nous pensons que la démocratie implique que l’État québécois récupère l’ensemble des pouvoirs qui en feraient un peuple souverain dans un pays libre, donc un Québec indépendant qui contrôle son économie et sa monnaie. Nous refusons de laisser à d’autres, en l’occurrence aux organismes canadiens ou internationaux, les décisions qui nous concernent.
36. La souveraineté que nous préconisons se veut un outil et un moyen pour réaliser librement une société juste et un régime politique fondé sur la souveraineté populaire. Libération nationale et émancipation sociale sont pour nous indissociables.
37. Nous voulons protéger notre langue et notre culture comme bases de notre développement en tant que peuple. Nous reconnaissons la pluralité de nos héritages culturels et l’apport de cette diversité à la culture commune. La culture québécoise, c’est notre façon à nous de vivre ensemble, notre mémoire, notre poésie, notre expertise, notre générosité, notre ouverture au monde, notre art de vivre. Et l’âme de notre peuple n’est pas à vendre, ni sa liberté. Nous croyons qu’il faut soutenir les entreprises culturelles québécoises qui doivent résister plus que jamais aux pressions du marché culturel mondial et à l’impérialisme culturel qu’il nous impose.
38. Nous voulons que chaque Québécoise et Québécois se sente membre d’un pays souverain et solidaire de tous les autres peuples de la planète qui subissent comme nous le rouleau compresseur de la mondialisation et de l’impérialisme culturel américain.
39. Nous pensons que, pour faire contrepoids aux accords multilatéraux de libre-échange, il faut réaliser des alliances et des ententes entre pays et négocier un nouveau contrat social mondial qui garantisse des règles touchant les droits de la personne, les conditions de travail, les services d’éducation et de santé, une fiscalité imposant une contribution sociale aux entreprises et aux capitaux, ainsi que la protection de l’environnement et des cultures nationales.
40. Nous refusons de considérer la protection de l’environnement comme un obstacle au développement économique et de mettre en danger l’avenir de nos ressources les plus essentielles, comme l’eau, en échange d’hypothétiques emplois.
41. Nous optons pour la gestion écologique de nos ressources et patrimoines de façon à en assurer la protection, la conservation, la durée et la mise en valeur et nous pensons que cette option doit s’imposer inconditionnellement et dans tous les secteurs, tant sur le plan national que dans les ententes internationales et ce, pour des raisons de santé et de survie collective.
42. Nous favorisons à cette fin l’adoption d’une charte garantissant la préservation et l’utilisation raisonnable de nos ressources.
UN GRAND MOUVEMENT D’ACTION POLITIQUE
43. Nous ne pouvons nous taire plus longtemps, sous prétexte de ne pas nuire au prochain référendum, et laisser détruire ce qui a été gagné au prix de luttes sociales longues et difficiles.
44. Nous invitons toutes et tous ainsi que chacune et chacun à mettre de côté leur méfiance envers l’action politique et à réinvestir le terrain politique. Cet appel s’adresse à toutes et à tous, individuellement, mais plus particulièrement à celles et à ceux qui oeuvrent dans les syndicats, les associations étudiantes, les groupes populaires et communautaires, les groupes de femmes, les groupes écologiques, les groupes d’entraide, les groupes pour la défense des droits, les comités de citoyennes et citoyens et de développement local en milieu urbain et en milieu rural, les groupes d’économie sociale, à toutes celles et à tous ceux qui n’acceptent plus de se taire. Nous pouvons unir et prolonger nos luttes particulières par la promotion d’un nouveau projet de société que nous implanterions progressivement dans les esprits et dans la réalité.
45. Pour réaliser ce projet alternatif de société, il faut rassembler autour des propositions de ce Manifeste toutes les forces progressistes du Québec en un grand mouvement démocratique d’éducation et d’action politique et créer dans tous les coins du Québec des équipes d’action imaginatives, capables de prendre position, d’interpeller les dirigeantes et dirigeants, de soutenir et prolonger les luttes populaires et de dénoncer les partis politiques traditionnels. Par ailleurs, dans le contexte actuel de maintien du Québec dans le régime constitutionnel fédéral, il faut développer et préserver, au niveau pan-canadien, des liens de solidarité et de coopération avec les organisations et les personnes partageant notre vision sociale et ce, principalement pour lutter contre les politiques néolibérales du gouvernement fédéral. Du reste, le Québec indépendant et progressiste que nous appelons de nos voeux entretiendrait des relations de solidarité agissante et de coopération mutuellement avantageuse avec tous les peuples épris de paix, de désarmement, de démocratie, de justice et de progrès social.
46. Un des objectifs de notre mouvement est de favoriser, dans sa mouvance, la mise sur pied d’une coalition électorale et d’un parti politique autonome capable d’offrir un choix aux électrices et électeurs et de traduire notre projet alternatif de société dans un programme politique précis et des décisions politiques concrètes à l’Assemblée nationale du Québec.
47. Nous invitons toutes celles et tous ceux qui partagent les idées de ce Manifeste à le dire publiquement et à se joindre au Rassemblement pour l’alternative politique. À nous de faire renaître l’espoir!
VIVE LE RAP!
VIVE LE PEUPLE QUÉBÉCOIS!
VIVE LE QUÉBEC!
ADOPTÉ À L’UNANIMITÉ PAR LE CONGRÉS SPÉCIAL DU RAP
TENU EN LA VILLE DE MONTRÉAL LES 7 ET 8 NOVEMBRE 1998